ACTE III - SCENE XIII



LES MÊMES, MARTHE, puis les commissionnaires.

MARTHE (entrant du fond et s'arrêtant sur le pas de la porte.)
Monsieur… ?

MASSENAY (se retournant à la voix de MARTHE.)
Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ? Qu'est-ce que c'est ?

MARTHE
Ce sont des commissionnaires avec des malles.

MASSENAY (ahuri.)
Comment "des malles" ?

CHANAL
Ah ! oui, je sais ! (A MARTHE.)
Qu'ils entrent ! (MARTHE sort. A MASSENAY du ton le plus naturel.)
Ce sont les malles de ma femme.

MASSENAY (avec un bond en arrière.)
Hein ?
(A ce moment MARTHE reparaît au fond ; tire les ferrures de la porte de façon à ouvrir celle-ci à deux battants. En même temps FRANCINE s'est levée comme une personne qui s'apprête à recevoir ses colis ; elle gagne l'extrême droite pour remonter au-dessus de la table.)

CHANAL (tout en prenant le fauteuil que vient de quitter sa femme et le portant à sa place première. A MASSENAY.)
Là ! tu vois, on apporte ses malles. Allons ! décide-toi, voyons !… Quelle chambre lui donnes-tu ?

MASSENAY (hors de lui, se démenant comme un diable dans un bénitier.)
Mais jamais de la vie ! Mais aucune chambre ! (Bondissant et se précipitant en voyant entrer trois commissionnaires traînant chacun une malle.)
Voulez-vous emporter ça ! vous autres ! Voulez- vous emporter ça !
(Les commissionnaires placent successivement les trois malles au fonf et un peu en zigzag, le côté étroit face au public. Massenay se précipite sur a première comme s'il allair l'enlever. Chanal se précipité également pour défendre les malles; il pousse la seconde contre la première de sorte que MASSENAY se trouvera emprisonné dans l'angle des deux malles.)

CHANAL (qui s'est précipité également.)
Du tout ! du tout ! n'écoutez pas.

MASSENAY
Mais pas du tout! je vous dis d'emporter ça.

CHANAL (aux commissionnaires leur donnant la pièce.)
Allez ! Allez ! C'est bien ! Allez- vous-en !
(Les commissionnaires sortent.)

MASSENAY (entre la première et la deuxième malle.)
Ah ! mais tu sais, Chanal… !

CHANAL (entre la deuxième et la troisième malle.)
Oh ! pardon, n'est-ce pas ?…

MASSENAY (hors de lui.)
Il n'y a pas de "n'est-ce pas" !
(Ils ont peu à peu élevé la voix, parlant l'un sur l'autre. Ils continuent à se chamailler, mais la voix de l'un couvrant celle de l'autre, on ne distingue pas ce qu'ils disent.)

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