ACTE I - SCENE VIII



LES MEMES, LA COMTESSE, puis LUC dans le hall, LE MARQUIS et VETILLE.

LA COMTESSE
Dans les bras l'un de l'autre ! Voilà qui est de bon augure. (Descendant au- dessus du fauteuil de droite de la table.)
Je vous demande pardon de vous interrompre : (A MAURICE.)
MAURICE, voici le docteur.

MAURICE
Comment ! Déjà ! On n'a pas averti.

LA COMTESSE
Je te demande pardon, on a timbré deux fois. Dans le feu de votre entretien vous n'aurez pas entendu. (Les deux coups de timbre dont parle LA COMTESSE ne doivent pas avoir été sonnés le public devant avoir, comme MAURICE, l'illusion de ne pas les avoir remarqués.)

MAURICE
(montrant l'abbé.)
Ah ! ma mère, mon meilleur médecin, le voici.

LA COMTESSE
Ah ! voici ces messieurs.
(Sur ces dernières répliques, on a vu dans le hall paraître LUC qui est allé se planter à son poste près de la porte donnant sur le perron. Arrivent LE MARQUIS et VETILLE que LUC introduit aussitôt.)

LE MARQUIS
(s'effaçant pour laisser passer le docteur.)
Tenez, si vous voulez entrer, mon cher docteur ?

VETILLE
(uniforme de médecin principal.)
Pardon.
(Se trouvant face à face avec LA COMTESSE, il s'incline.)

LE MARQUIS
(3)
Ma chère sœur, je te présente mon ami, monsieur le médecin principal Vétillé.

VETILLE
(2)
Madame, très honoré.

LA COMTESSE
(1 descendant en scène tout en parlant. )
Combien c'est aimable à vous de vous être dérangé, Docteur !… Vraiment, par cette chaleur…!

VETILLE
(descendant à l'exemple de LA COMTESSE.)
Il fait chaud, en effet ! il fait chaud !

LA COMTESSE
Et surtout en uniforme !

VETILLE
Ah ! ça, madame, c'est un principe chez moi ! Je déplore la fâcheuse tendance que je vois chez les officiers de se mettre en pékins dès qu'ils peuvent. On doit avoir l'orgueil de son uniforme.

LA COMTESSE
Ces sentiments vous font honneur.

VETILLE
(tout en se retournant vers L'ABBE qui est devant le fauteuil à gauche de la bergère.)
En tout cas, c'est ma façon de voir, ça ne fait de mal à personne. (A L'ABBE sans transition.)
Vous êtes ecclésiastique, monsieur, si je ne me trompe…?

L'ABBE
(souriant.)
Et catholique, oui, monsieur.

LA COMTESSE
(présentant.)
M. L'abbé Bourset, curé de notre village.

VETILLE
(s'inclinant.)
Ah ! parfaitement ! (Poursuivant sa pensée.)
Eh ! bien, il ne vous vient pas à l'idée de vous mettre en pékin ? Alors, pourquoi est-ce que je m'y mettrais ?

L'ABBE
Parfaitement dit.
(Il remonte.)

LA COMTESSE
(présentant son fils qui est derrière la bergère et redescend par l'extrême droite.)
Je vous présente également mon fils.
(MAURICE s'incline.)

VETILLE
(allant à MAURICE et se plantant devant lui en assujétissant son lorgnon sur son nez.)
Aha ! C'est le jeune phénomène en question.

LA COMTESSE
C'est lui dont la santé…

VETILLE
(les deux poings sur les hanches, et dévisageant MAURICE comme il le ferait d'un soldat au régiment.)
Oui, oui, je suis au courant. Le marquis m'a exposé en venant. Eh ! bien, mais… je ne peux pas vous répondre comme ça, moi ! faudrait voir, faudrait voir !

LA COMTESSE
(esquissant un mouvement dans la direction de la chambre du fond.)
Si vous voulez, docteur, que nous passions dans la chambre de mon fils.

VETILLE
Eh ! bien, mais… ça me paraît ce qu'il y a de plus pratique.

LA COMTESSE
(à son fils, l'invitant à se rendre dans sa chambre.)
Maurice !

MAURICE
Voilà maman.
(Il remonte par l'extrême droite; VETILLE remonte à la suite de LA COMTESSE. A ce moment on entend deux coups de timbre au lointain.)

LA COMTESSE
Oh ! justement voici du monde, dépêchons-nous ! (A L'ABBE et au marquis, qui sont restés en place.)
Vous permettez ! (Ils s'inclinent.)
Par ici docteur !
(Elle entre dans la chambre de MAURICE suivie du docteur et de MAURICE. On voit comme précédemment paraître LUC dans le hall pour attendre les nouveaux arrivants.)

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