Acte I - Scène première
(LA REINE MARGOT, LES DAMES D'HONNEUR, GILONNE )
CHOEUR(Les Dames d'honneur, tout en déshabillant la Reine Margot.)
C'est le coucher de la Reine, La Reine, la Reine. Mais le coucher d'aujourd'hui, Comme on dit, en vaut la peine. La peine, la peine. Qu'en pense le roi Henri ? Une partie des Dames. L'heure s'avance, allons, madame, Allons, allons ! Pour votre époux qui vous réclame. Pressons, pressons. Les autres Dames, déshabillant la Reine. Cette chemise virginale Quittons, quittons ! Pour cette autre plus conjugale, Changeons, changeons !
TOUTES
Une nuit d'hyménée, Est une nuit de volupté. Nous voulons, reine aimée, Que votre Majesté Soit belle, soit belle. Belle à rendre fou d'elle L'heureux qui la verra. Qui sera Le mari de la belle, Le mari qui l'aura. Les Dames. Qui l'aura.
UNE DAME
Point de fanfreluches,
TOUTES
D'onguents, ni de fard.
LES DAMES
Ce sont des embûches
TOUTES
Qu'on laisse au rancart.
UNE DAME
Rien que la nature
TOUTES
C'est bien plus malin.
UNE DAME
Qui veut la capture
TOUTES
Du cœur masculin,
UNE TROISIÈME DAME
Des voiles très vagues,
TOUTES
Des tissus légers
UNE DAME
Qui semblent des vagues
TOUTES
Lorsque vous bougez.
QUATRIÈME DAME
De la toile fine
TOUTES
Voilant vos appas,
UNE DAME
Où tout se devine.
TOUTES
Voilà le programme Par nous édicté, Appliquant, Madame, Cette vérité
LES DAMES
Cette vérité, Que le grand attrait de la femme Quand elle est belle, est sa beauté. ( Reprise en choeur.)
C'est le coucher… etc. (Tout cet ensemble est accompagné par le tocsin qu'on entend en sourdine au loin.)
MARGOT(à Gilonne qui entre)
: Qu'apportes-tu là, nourrice ?
GILONNE
La fleur d'oranger comme il convient, Majesté et la pommade, (émue)
. Pauvre mignonne ! (Elle l'embrasse)
.
MARGOT
Allons, voyons, Gilonne !… pas de vaine sensiblerie.
GILONNE
Madame, c'est plus fort que moi ! Quand je pense que j'ai nourri la reine de mon lait… et qu'aujourd'hui !… tout à l'heure !
MARGOT
C'est bien, Gilonne. Mesdames, vous pouvez vous retirer. (Les dames font la révérence et sortent par la gauche, tandis que l'orchestre reprend en sourdine le motif du choeur. Le tocsin se fait entendre plus fort.)