ACTE QUATRIÈME - SCÈNE XV
(Les mêmes, MARIE, LOTHUNDIAZ.)
MARIE
On ne m'a donc pas trompée, vous êtes la proie de vos ennemis ! À moi donc, cher Alfonse, de mourir pour toi, et de quelle mort ? Ami, le ciel est jaloux des amours parfaites, il nous dit par ces cruels événements, que nous appelons des hasards, qu'il n'est de bonheur que près de Dieu. Toi…
SARPI
Señora !
LOTHUNDIAZ
Ma fille !
MARIE
Vous m'avez laissée libre en cet instant, le dernier de ma vie ! je tiendrai ma promesse, tenez les vôtres. Toi, sublime inventeur, tu auras les obligations de ta grandeur, les combats de ton ambition, maintenant légitime : cette lutte occupera ta vie ; tandis que la comtesse Sarpi mourra lentement et obscurément entre les quatre murs de sa maison… Mon père, et vous, comte, il est bien entendu que, pour prix de mon obéissance, la vice-royauté de Catalogne accorde au seigneur Fontanarès un nouveau délai d'un an pour son expérience.
FONTANARÈS
Marie, vivre sans toi ?
MARIE
Vivre avec ton bourreau !
FONTANARÈS
Adieu, je vais mourir.
MARIE
N'as-tu pas fait une promesse solennelle au roi d'Espagne, au monde ! (Bas.)
Triomphe ! nous mourrons après.
FONTANARÈS
Ne sois point à lui, j'accepte.
MARIE
Mon père, accomplissez votre promesse.
FAUSTINE
J'ai triomphé !
LOTHUNDIAZ(Bas.)
Misérable séducteur ! (Haut.)
Voici dix mille sequins. (Bas.)
Infâme ! (Haut.)
Un an des revenus de ma fille. (Bas.)
Que la peste l'étouffe ! (Haut.)
Dix mille sequins que sur cette lettre, le seigneur Avaloros vous comptera.
FONTANARÈS
Mais, Monseigneur, le vice-roi consent-il à ces arrangements ?…
SARPI
Vous avez publiquement accusé la vice-royauté de Catalogne de faire mentir les promesses du roi d'Espagne, voici sa réponse : (Il tire un papier)
une ordonnance qui, dans l'intérêt de l'État, suspend toutes les poursuites de vos créanciers, et vous accorde un an pour réaliser votre entreprise.
FONTANARÈS
Je serai prêt.
LOTHUNDIAZ
Il y tient ! Venez ma fille : on nous attend aux Dominicains, et Monseigneur nous fait l'honneur d'assister à la cérémonie.
MARIE
Déjà !
FAUSTINE (à Paquita.)
Cours, et reviens me dire quand ils seront mariés.