ACTE I - Scène VI



(IRIS est sur l'arc-en-ciel ; JUNON et PALLAS, chacune dans son char ; JASON, ORPHÉE, Argonautes.)

Orphée (chante.)
Femme et sœur du maître des Dieux,
De qui le seul regard fait nos destins propices,
Nous as-tu jusqu'ici guidés sous tes auspices,
Pour nous voir périr en ces lieux ?
Contre des bras mortels tout ce qu'ont pu nos armes,
Nous l'avons fait dans les combats :
Contre les monstres et les charmes
C'est à toi maintenant de nous prêter ton bras.

Iris
Princes, ne perdez pas courage ;
Les deux mêmes divinités
Qui vous ont garantis sur les flots irrités
Prennent votre défense en ce climat sauvage.
(Ici Junon et Pallas se montrent dans leurs chars.)
Les voici toutes deux, qui de leur propre voix
Vous apprendront sous quelles lois
Le destin vous promet cette illustre conquête ;
Elles sauront vous la faciliter :
Écoutez leurs conseils, et tenez l'âme prête
À les exécuter.

Junon
Tous vos bras et toutes vos armes
Ne peuvent rien contre les charmes
Que Médée en fureur verse sur la toison :
L'amour seul aujourd'hui peut faire ce miracle ;
Et dragon ni taureaux ne vous feront obstacle,
Pourvu qu'elle s'apaise en faveur de Jason.
Prête à descendre en terre afin de l'y réduire,
J'ai pris et le visage et l'habit de sa sœur.
Rien ne vous peut servir si vous n'avez son cœur ;
Et si vous le gagnez, rien ne vous sauroit nuire

Pallas
Pour vous secourir en ces lieux,
Junon change de forme et va descendre en terre ;
Et pour vous protéger Pallas remonte aux cieux,
Où Mars et quelques autres dieux
Vont presser contre vous le maître du tonnerre.
Le soleil, de son fils embrassant l'intérêt,
Voudra faire changer l'arrêt
Qui vous laisse espérer la toison demandée ;
Mais quoi qu'il puisse faire, assurez-vous qu'enfin
L'amour fera votre destin,
Et vous donnera tout, s'il vous donne Médée.
(Ici, tout d'un temps, Iris disparoît, Pallas remonte au ciel, et Junon descend en terre, en traversant toutes deux le théâtre, et faisant croiser leurs chars.)

Jason
Eh bien ! si mes conseils…

Pélée
N'en parlons plus, Jason :
Cet oracle l'emporte, et vous aviez raison.
Aimez, le ciel l'ordonne, et c'est l'unique voie
Qu'après tant de travaux il ouvre à notre joie.
N'y perdons point de temps, et sans plus de séjour
Allons sacrifier au tout-puissant Amour.
(FIN DU PREMIER ACTE.)

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