Pantalone, il dottore, Clarice, Silvio, Brighella, Smeraldina, un autre serviteur de Pantalone, Truffaldino et Béatrice déguisée en homme, sous le nom de Federigo.
Beatrice (Aux spectateurs)
Plût au ciel que mon travestissement fonctionne. (A Pantalone)
Monsieur Pantalone, après les échanges épistolaires fort agréables que nous avons eus, je ne m'attendais pas à être traité de la sorte en arrivant ici. Je vous envoie mon serviteur qui vous demande de me recevoir et vous me faites attendre dehors, en plein courant d'air.
Brighella (Aux spectateurs)
Il ne s'agit pas de Federigo mais de sa sœur Beatrice. Que signifie cette embrouille ?
Pantalone
Qui êtes- vous Monsieur ?
Beatrice
Federigo Rasponi de Turin, pour vous servir.
Pantalone
!?!? …Seigneur…je suis…malheureux-sement … surpris… de vous voir… ici… ainsi… sain et sauf alors que j'avais reçu de fort mauvaises nouvelles de vous. D'ailleurs je ne vous crois pas encore tout à fait.
Beatrice
Je sais, on a raconté que j'avais été tué dans une rixe. Grâce au ciel, j'ai seulement été blessé. A peine guéri, j'ai entrepris ce voyage à Venise, déjà convenu depuis fort longtemps avec vous.
Pantalone
Vous avez la physionomie d'un gentilhomme mais sachant de source sûre que monseigneur Federigo Rasponi est mort, vous comprendrez que sans preuve de votre identité j'aurais du mal à vous écouter….
Beatrice
Votre doute est parfaitement fondé. Je comprends la nécessité de me justifier. Voici quatre lettres écrites par vos amis correspondants, dont l'une est de l'administrateur de notre banque. Vous reconnaitrez la signature et elles attesteront de mon identité. (Elle donne 4 lettres à Pantalone, qui les lit)
Clarice (tout bas, à Silvio)
Ah Silvio, nous sommes perdus !
Silvio (tout bas, à Clarice)
Je perdrais plutôt la vie, mais toi jamais !
Beatrice (Aux spectateurs)
Ciel ! Brighella ici ! Comment diable est-il arrivé jusque là ? (A Brighella)
Mon ami, il me semble vous connaître ?
Brighella
Votre Seigneurie ne se souvient pas de Brighella Cavicchio de Turin ?
Beatrice
Ah oui, maintenant je vous reconnais. Que faites-vous à Venise mon brave ? (Tout bas, à Brighella)
Pour l'amour du ciel, ne me démasquez pas !
Brighella (tout bas, à Beatrice)
Pas encore. (A toute l'assemblée)
Je suis aubergiste, pour vous servir Monseigneur.
Beatrice
Oh, ça tombe bien ! Puisque j'ai le plaisir de vous connaître, je vais venir loger dans votre auberge.
Brighella
Vous m'en voyez très honoré. (Aux spectateurs)
Y a d'la tarantelle dans l'air.
Pantalone
Il apparaît certain que ce sont des lettres de créance pour le seigneur Federigo Rasponi et puisque c'est vous qui me les présentez, il faut croire que vous êtes cet homme-là.
Beatrice
Si vous aviez encore un doute, monsieur Brighella ici présent, pourra vous assurer de mon identité.
Brighella
Assurément, je m'en porte garant.
Pantalone
Puisque j'ai la garantie de mon cher Brighella, Monsieur Federigo Rasponi, je vous prie de bien vouloir excuser mes doutes.
Clarice (tout bas, à Silvio)
Pauvre de moi, qu'allons-nous devenir ?
Silvio (tout bas à Clarice)
Ne crains rien ; tu es à moi
Beatrice (montrant du doigt Clarice)
Monsieur Pantalone, qui est cette femme ?
Pantalone
C'est ma fille, Clarice.
Beatrice
Ma promise ?
Pantalone
Oui Monsieur, précisément. (Aux spectateurs)
Me voilà dans un bel imbroglio.
Beatrice (à Clarice)
Mademoiselle, permettez-moi de vous présenter mes respects.
Clarice (de marbre)
Je suis votre servante.
Beatrice (à Pantalone)
Elle m'accueille bien froidement.
Pantalone
Que voulez-vous ? Elle est d'un naturel timide.
Beatrice (montrant du doigt Silvio)
Et monsieur est un de vos parents ?
Pantalone
Il s'agit de mon neveu.
Silvio
Je ne suis pas son neveu. Je suis le fiancé de Clarice.
Dottore (tout bas à Silvio)
Bravo ! Ne te laisse pas faire. Exprime-toi mais ne provoque pas !
Beatrice
Comment ? Vous êtes le fiancé de Mademoiselle Clarice ? Ne m'est-elle pas destinée ?
Dottore
Votre Seigneurie est arrivée un peu tard. La loi est claire. Prior in tempore, potior in iure
Pantalone
Cher Seigneur Federigo, tout le monde croyait votre disgrâce réelle… c'est à dire que vous étiez mort, aussi avais-je donné ma fille au Seigneur Silvio ; Finalement, vous êtes vivant et je tiendrai parole : Clarice est à vous. Seigneur Dottore, vous étiez au courant du marché ; vous ne pouvez contester les choses. (Aux Spectateurs)
: Je ne tiens pas à marcher à côté de mon ombre
Silvio
Mais le seigneur Federigo ne consentira pas à prendre pour épouse une femme qui a déjà promis sa main à un autre.
Beatrice
Oh, je ne suis pas si délicat. Je la prendrai malgré tout. (Aux spectateurs)
J'ai bien envie de m'amuser un peu.
Beatrice
J'espère que mademoiselle Clarice ne me repoussera pas.
Silvio
Allons Monsieur, vous êtes arrivé trop tard. Mademoiselle Clarice doit être mienne, n'espérez pas que je vous la cède. Et qui voudra Clarice devra me la disputer jusqu'à la mort.
Dottore (tout bas à Silvio)
Bravo, sacrebleu !
Beatrice (Aux spectateurs)
Je n'ai pas envie de mourir pour cela. (A Clarice)
: Et vous, mademoiselle Clarice ? Vous ne dites rien ?
Clarice
Je dis que vous n'êtes venu que pour faire mon malheur. (Elle sort)
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