Le fils de Giboyer
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ACTE QUATRIÈME - SCÈNE VI

Emile Augier

ACTE QUATRIÈME - SCÈNE VI


(LES MÊMES, LE MARQUIS, M. COUTURIER, puis successivement LA BARONNE et FERNANDE, LE CHEVALIER DE GERMOISE et UNE DAME, MADAME MARÉCHAL, LE VICOMTE DE VRILLIÈRE, et MADAME DE LA VIEUXTOUR.)

LE MARQUIS (à M. Couturier, sur le devant de la scène, à gauche.)
Puisque le comité est unanime pour M. d'Aigremont, je n'ai qu'à m'incliner devant sa décision, si pénible qu'elle soit.

M. COUTURIER
Il ne l'a prise qu'à son corps défendant, monsieur le marquis, et devant un intérêt majeur que vous reconnaissez vous-même.

LE MARQUIS
Je no dis pas non, mon cher; mais j'aimerais qu'un autre que moi se chargeât de porter le coup à ce pauvre Maréchal.

M. COUTURIER
Nous pensions qu'il serait moins dur de votre" main ; mais, s'il vous en coûtait trop, je m'en chargerais.

LE MARQUIS
Je vous remercie.
(Il s'assied à gauche. — M. Couturier se perd dans les groupes.)

LE CHEVALIER (à une dame.)
Ce petit Gérard est vraiment mieux que le comte d'Outreville; mais est-ce bien sûr que mademoiselle Fernande ait une préférence pour le secrétaire? La baronne en a une peur qui ressemble à une certitude…
(Il conduit la dame à un fauteuil.)

MADAME MARÉCHAL (assise sur le canapé, au comte, qui lui apporte du thé.)
Bouillant, s'il vous plaît; je l'aime bouillant.

MADAME DE LA VIEUXTOUR (derrière le canapé, au vicomte de Vrillière.)
Pauvre dame ! elle aime tout ce qui brûle les doigts.

LE VICOMTE DE VRILLIÈRE
Ma foi ! ces ambitions bourgeoises méritent bien*-d'être un peu échaudées-.

MADAME DE LA VIEUXTOUR
Après cela, la baronne se trompe peut-être.

LE VICOMTE DE VRILLIÈRE
Hum! le jeune homme, est charmant…

MADAME DE LA VIEUXTOUR
Pas autant qu'un titre de comtesse, (pendant ce dialogue, elle est remontée au milieu de la scène, et s'adressant a toute l'assistance.)
Le père Vernier a été admirable ce matin. — Y étiez-vous, monsieur de Vrillière ?

LE VICOMTE DE VRILLIÈRE
Je n'ai pas pu entrer.

GIBOYER (à part.)
On refusait du monde.

MADAME DE LA VIEUXTOUR
Vous avez perdu. Il a eu sur la charité des pensées si touchantes, si nouvelles!

GIBOYER (à part.)
A-t-il dit qu'il ne faut pas la faire ? .

MADAME MARÉCHAL
J'ai été choquée de la toilette de madame Dervieux. L'avez-vous remarquée?

LA BARONNE
Non.

MADAME MARÉCHAL
Figurez-vous qu'elle avait une robe de satin chamois avec des ornements de velours cerise tout autour, le pardessus pareil, garni d'hermine, un chapeau de tulle blanc bouillonné, couvert de petites plumes cerise. — On vient à l'église pour se recueillir et non pas pour se montrer, n'est-il pas vrai?

LE MARQUIS (de l'autre bout de la scène.)
Et je vois avec plaisir, madame, que vous étiez recueillie.

MADAME MARÉCHAL
Sans doute; j'avais une robe carmélite.

MADAME DE LA VIEUXTOUR
Qui vous seyait à ravir.

LA BARONNE (allant à Giboyer, derrière le canapé.)
Vous ne prenez pas de thé, monsieur?

GIBOYER
Mille grâces, madame, je le crains.

LA BARONNE (, à l'oreille de madame Maréchal, lui montrant de l'autre côté Maximilien qui cause debout avec Fernande assise.)
C'est le moment.
(Elle remonte vers le fond.)

MADAME MARÉCHAL
Monsieur Gérard!… débarrassez-moi de ma tasse.

LE COMTE (se précipitant pour la prendre sur un signe de la baronne.)
Madame…
(Maximilien, qui s'est avance sur l'interpellation de madame Maréchal s'arrête en voyant le mouvement du comte.)

MADAME MARÉCHAL
Laissez, monsieur le comte… ce jeune homme est là.

FERNANDE (à part.)
C'est trop fort.
(Elle se lève et va vivement à la table du fond. Gérard fait un pas en arrière.)

GIBOYER (à part.)
On le sonne !

MADAME MARÉCHAL (tendant toujours sa tasse.)
Monsieur Gérard?

FERNANDE (de la table.)
Monsieur Gérard! voulez-vous me permettre de-vous servir?

MAXIMILIEN
Mademoiselle, j'ai déjà refusé.

FERNANDE ( allant à lui avec une tasse de thé.)
Vous ne, refuserez pas de ma main.
(Maximilien s'incline et prend la tasse. —Étonnement général. Grand silence.)

GIBOYER (à part.)
Voilà son secret! — Ça jette un froid, (A madame Maréchal.)
Comme cette tasse vous embarrasse ! A défaut du neveu, souffrez, madame, que l'oncle soit votre valet.
(Il prend la tasse des mains de. madame Maréchal stupéfaite et.la reporte à la table.)

LA BARONNE (à madame Maréchal.)
Pauvre amie! qui pouvait.prévoir…?

MADAME MARÉCHAL
Et son père qui n'est pas là !
(Elles rentrent dans le salon; les invités les suivent peu à peu.)


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