Acte II - Scène II
AMANDINE, LANDERNAU
LANDERNAU (qui est entré de droite sans être entendu par Amandine)
Qu'est-ce que tu lis là, Bibiche ?
AMANDINE (mettant vivement une main derrière son dos)
Moi… rien !…
LANDERNAU
Comment… rien !… je t'ai bien vue… quelle est cette lettre que tu me caches ?…
AMANDINE
Rien !… je te dis… un papier sans importance.
LANDERNAU
Alors,… pourquoi l'as-tu vivement dissimulé à mon approche ?
AMANDINE
C'est que…
LANDERNAU
Allons… montre-le-moi !
AMANDINE
Je ne peux pas !
LANDERNAU
Ah ! bobonne… Tu me fais supposer des choses !… Prends garde !… je veux ce billet !
AMANDINE (passant au deuxième plan)
Tu ne l'auras pas !
LANDERNAU
Je ne l'aurai pas !… Amandine. Tu me trompes… Cette lettre est une lettre d'amour. Ah !… Je t'aurais pourtant bien cru à l'abri… Donne-moi ça !…
AMANDINE (à part)
Je suis perdue !… (Haut.)
Non !
LANDERNAU (la lui prenant de force)
Eh !… Donne-moi donc, je te dis…
AMANDINE
Ah !… Tiens !… Tu n'es qu'un Othello !…
(Elle tombe sur le canapé.)
LANDERNAU
L'écriture du ténor !… Elle aussi !…
(Il veut ouvrir le billet.)
AMANDINE (subitement, se levant)
Ne lis pas !… (À part.)
Ah ! ma foi, tant pis ! (Haut.)
Cette lettre n'est pas pour moi !…
LANDERNAU
Pas pour toi ?… Et pour qui ?…
AMANDINE
Mais pour… (À part.)
Ah ! quelle idée !… (Haut.)
Etes-vous capable de conserver un secret jusqu'à la mort ?
LANDERNAU (avec conviction)
Et même après !
AMANDINE
Eh bien !… Cette lettre est pour Mme Pacarel.
LANDERNAU
Hein ?… Pour ?… C'est vrai au moins, ça ?… Après tout, ça ne m'étonne pas… Il lui a dit : "Je vous aime", devant moi !… Donc, il se peut bien… C'est égal… Je le saurai…
(Fausse sortie.)
AMANDINE
Comment cela ?
LANDERNAU
Eh ! parbleu… en remettant ce billet à Mme Pacarel.
AMANDINE
Hein ?
LANDERNAU (faisant mine de remonter au fond)
Dame !
AMANDINE (le retenant)
Vous ne ferez pas cela !
LANDERNAU
Je me gênerai…
AMANDINE
C'est impossible !…
LANDERNAU
Pourquoi ?… Ce billet est pour elle… je le lui remets… c'est tout naturel.