Scène IX
De Jaival
Ah ! ben, on n'est pas long à ouvrir !
Victor
Monsieur ?
De Jaival
Monsieur Ventroux, s'il vous plaît !
Ventroux (du salon.)
C'est ici. Vous désirez, Monsieur ?
De Jaival
Ah ! pardon ! (Descendant en scène.)
Je suis monsieur Romain de Jaival, du Figaro.
Ventroux
Ah ! parfaitement, Monsieur ! (A Victor qui est au seuil du salon.)
Eh bien ! allez-vous-en !
Victor
Oui, Monsieur.
(Il sort et referme la porte sur lui.)
Ventroux
Qu'y a-t-il pour votre service ?
De Jaival
Voici : je vous suis envoyé par mon journal pour vous demander une interview.
Ventroux
Aha !
De Jaival
Sur la politique en général… Comme vos derniers discours vous ont mis très en vue !…
Ventroux (flatté.)
Ah ! Monsieur…
De Jaival
Je dis ce que tout le monde pense !… et en particulier sur le projet de loi dont vous êtes un des promoteurs : "Les accouchements ouvriers". L'accouchement gratuit et l'État sage-femme.
Ventroux
Oui, oh ! très intéressant ! et qui me tient très à cœur.
De Jaival
Seulement, je voudrais faire quelque chose de pimpant, de pittoresque, de pas tout le monde ! Je m'attache à faire des chroniques brillantes ; si vous m'avez déjà lu !…
Ventroux
Mais, certainement, certainement ! Monsieur de… De Jaival Jaival !… Romain de Jaival !
Ventroux
De Jaival, parfaitement ! Eh bien ! mais je suis à votre disposition. Seulement, j'ai une petite affaire à terminer avec Monsieur. (Présentant.)
Monsieur Hochepaix.
De Jaival (s'inclinant.)
Hochepaix ?
Hochepaix (épelant vivement.)
P-a-i-x !
Ventroux
Maire de Moussillon-les-Indrets !
De Jaival
Oh ! parfaitement, je connais !
Hochepaix (étonné et flatté.)
Moi ?
De Jaival
J'y ai souvent pêché à la ligne.
Hochepaix
Ah ! à Moussillon-les… oui, oui ! Non, je comprenais… Oui, oui !
Ventroux
Alors, si vous voulez m'attendre un instant, nous passons, Monsieur et moi, dans mon cabinet ; dans cinq minutes, je suis à vous.
De Jaival
Mais je vous en prie ! Vous permettez seulement que je m'installe à cette table ; je prendrai quelques notes pendant ce temps-là.
Ventroux (très aimable.)
Vous êtes chez vous !
De Jaival (descendant pour contourner la table et aller s'asseoir sur la chaise à gauche de celle-ci.)
Pardon !
Ventroux
Venez, mon cher maire !… de Moussillon-les-Indrets !
Hochepaix
Tout à vous, mon cher député.
(Ils sortent pan coupé à gauche.)