ACTE IV - Scène VIII



(Hippolyte Célidée.)

Célidée
N'ai-je pas tantôt vu mon perfide avec vous ?
Il a bientôt quitté des entretiens si doux.

Hippolyte
Qu'y ferait-il, ma sœur ? Ta fidèle Hippolyte
Traite cet inconstant ainsi qu'il le mérite.
Il a beau m'en conter de toutes les façons,
Je le renvoie ailleurs pratiquer ses leçons.

Célidée
Le parjure à présent est fort sur ta louange ?

Hippolyte
Il ne tient pas à lui que je ne sois un ange ;
Et quand il vient ensuite à parler de ses feux,
Aucune passion jamais n'approcha d'eux.
Par tous ces vains discours il croit fort qu'il m'oblige,
Mais non la moitié tant qu'alors qu'il te néglige :
C'est par là qu'il me pense acquérir puissamment ;
Et moi, qui t'ai toujours chérie uniquement,
Je te laisse à juger alors si je l'endure.

Célidée
C'est trop prendre, ma sœur, de part en mon injure ;
Laisse-le mépriser celle dont les mépris
Sont cause maintenant que d'autres yeux l'ont pris.
Si Lysandre te plaît, possède le volage,
Mais ne me traite point avec désavantage ;
Et si tu te résous d'accepter mon amant,
Relâche-moi du moins le cœur de Dorimant.

Hippolyte
Pourvu que leur pouvoir se range sous le nôtre,
Je te donne le choix et de l'un et de l'autre ;
Ou, si l'un ne suffit à ton jeune désir,
Défais-moi de tous deux, tu me feras plaisir.
J'estimai fort Lysandre avant que le connaître ;
Mais depuis cet amour que mes yeux ont fait naître,
Je te répute heureuse après l'avoir perdu.
Que son humeur est vaine ! et qu'il fait l'entendu !
Que son discours est fade avec ses flatteries !
Qu'on est importuné de ses afféteries !
Vraiment, si tout le monde était fait comme lui,
Je crois qu'avant deux jours je sécherais d'ennui.

Célidée
Qu'en cela du destin l'ordonnance fatale
A pris pour nos malheurs une route inégale !
L'un et l'autre me fuit, et je brûle pour eux,
L'un et l'autre t'adore, et tu les fuis tous deux.

Hippolyte
Si nous changions de sort, que nous serions contentes !

Célidée
Outre, hélas ! que le ciel s'oppose à nos attentes,
Lysandre n'a plus rien à rengager ma foi.

Hippolyte
Mais l'autre, tu voudrais…

Autres textes de Pierre Corneille

Tite et Bérénice

"Tite et Bérénice" est une tragédie en cinq actes écrite par Pierre Corneille, jouée pour la première fois en 1670. Cette pièce est inspirée de l'histoire réelle de l'empereur romain...

Théodore

"Théodore" est une tragédie écrite par Pierre Corneille, jouée pour la première fois en 1645. Cette œuvre est notable dans le répertoire de Corneille pour son sujet religieux et son...

Suréna

"Suréna" est une tragédie écrite par Pierre Corneille, présentée pour la première fois en 1674. C'est la dernière pièce écrite par Corneille, et elle est souvent considérée comme une de...

Sophonisbe

"Sophonisbe" est une tragédie écrite par Pierre Corneille, présentée pour la première fois en 1663. Cette pièce s'inspire de l'histoire de Sophonisbe, une figure historique de l'Antiquité, connue pour son...

Sertorius

"Sertorius" est une tragédie écrite par Pierre Corneille, présentée pour la première fois en 1662. Cette pièce se distingue dans l'œuvre de Corneille par son sujet historique et politique, tiré...


Les auteurs


Les catégories

Médiawix © 2024