Acte III - Scène II
(LES MÊMES, PLUCHEUX, PUIS UN GARDIEN )
TOUS
Ah ! enfin !
PLUCHEUX(parlant au dehors.)
Tenez ! par ici !
GÉVAUDAN
Ah ! çà ! vous n'avez donc pas entendu la sonnette ?
PLUCHEUX
Eh ! qu'est-ce que vous me chantez ! Conduisez-la dans la salle de douches et aspergez-la ! (Le gardien sort avec Michette par la droite, deuxième plan.)
GÉVAUDAN
Il paraît qu'elle n'est pas encore calmée, la dame… Ce sont des crises intermittentes !
PLUCHEUX
Intermittentes !… dites assommantes ! Enfin je l'ai confiée à mon adjoint…
GÉVAUDAN
Votre adjoint !… Et nous qui le prenions pour un employé ! C'est M. le Maire !
TOUS LES TROIS(, saluant Plucheux. )
M. le Maire !
PLUCHEUX(à part.)
Qu'est-ce qu'ils ont ?… Ah ! c'est vrai ! j'oublie toujours qu'ils ont un grain !… (Il écarte machinalement sa veste et laisse voir une ceinture de gymnastique tricolore.)
GÉVAUDAN(bas à Laure.)
Tu as vu !… il est ceint !… il a son écharrpe. Monsieur le maire… laissez-moi vous faire compliment. Elle est très bien, votre petite mairerie. (Il passe devant lui en saluant.)
ALFRED(s'avançant derrière son frère, toujours son rideau sur la tête. )
Très bien !… un peu nue…
PLUCHEUX
Qu'est-ce que vous avez sur la tête, vous ?
ALFRED
Ne faites pas attention !… je me sèche !… c'est à cause de la sonnette.
PLUCHEUX
Eh dites donc !… c'est le rideau !… ne vous gênez pas. Est-ce c'est vous qui payerez ? (Il le lui retire.)
ALFRED(à part.)
Est-il pingre !
PLUCHEUX(remontant. )
Décidément ils sont bien malades !
GÉVAUDAN
Tiens ! il s'en va ! Hé ! monsieur le maire !
PLUCHEUX
Qu'est-ce qu'il y a ?
GÉVAUDAN
Eh bien, voilà !… vous seriez bien aimable de dire qu'on nous fasse avancer une voiture !
PLUCHEUX
Une voiture ! pourquoi faire !
ALFRED
Dame ! pour nous en aller !
PLUCHEUX(ironiquement.)
Vous en aller !… Mais comment donc !… rien de plus simple !
GÉVAUDAN
N'est-ce pas ! s'il vous plaît !… Je vais vous dire !… nous avons réfléchi… nous ne nous marions plus…
PLUCHEUX
Oui ! oui ! je le savais ! Si on commence à écouter leurs histoires… (Il fait mine de remonter.)
GÉVAUDAN(le retenant par le bras. )
Alors, nous venons de décider que nous retournerions à Loches comme nous étions venus.
PLUCHEUX
Oui ! oui ! je le savais.
GÉVAUDAN
Comment il savait !… mais il sait donc tout ! Alors vous vous chargez de notre voiture ?
PLUCHEUX
Oui ! oui !
GÉVAUDAN
Ce maire est un père !… (Tirant de sa poche, son porte-monnaie. À Plucheux.)
Tenez ! voilà vingt sous pour le garçon !
PLUCHEUX
Comment ! vous avez de l'argent sur vous ! On ne vous a donc pas fouillés ?
GÉVAUDAN
Non !
PLUCHEUX
Mais on n'entre pas ici avec de l'argent !
GÉVAUDAN
Dans les mairies !
LAURE
C'est spécial à Paris sans doute !
GÉVAUDAN
Je n'en saisis pas la raison.
PLUCHEUX(lui prenant son porte-monnaie et le mettant dans sa poche.)
Allons ! donnez-moi ça !
GÉVAUDAN(à part. )
Tiens ! il me fait mon porte-monnaie ! c'est un filou, ce maire-là ! Hé ! monsieur le maire !
PLUCHEUX(une fois sorti, lui fermant la porte de la grille au nez.)
Restez là !… Voilà le docteur Saint-Galmier qui va vous visiter.