ACTE IV - Scène IV
(DON CARLOS, HERNANI, DONRUYGOMEZ, LES CONJURÉS.)
DON CARLOS
Messieurs, allez plus loin ! L'empereur vous entend.(Tous les flambeaux s'éteignent à la fois. Profond silence. Il fait un pas dans les ténèbres, si épaisses qu'on y distingue à peine les conjurés muets et immobiles.)
Silence et nuit ! — l'essaim en sort et s'y replonge. Croyez-vous que ceci va passer comme un songe ? Frappez, c'est Charles-Quint ! Frappez, faites un pas ! Voyons, oserez-vous ? Non, vous n'oserez pas. Vos torches flamboyaient sanglantes sous ces voûtes ; Mon souffle a donc suffi pour les éteindre toutes ! Mais voyez, et tournez vos yeux irrésolus, Si j'en éteins beaucoup, j'en allume encor plus.(Il frappe de la clef de fer sur la porte de bronze du tombeau. À ce bruit toutes les profondeurs du souterrain se remplissent de soldats portant des torches et des pertuisanes ; à leur tête le duc d'Alcala, le comte de Casa-Palma, etc.)
Accourez, mes faucons ! J'ai le nid, j'ai la proie !(Aux conjurés.)
J'illumine à mon tour. Le sépulcre flamboie, regardez !(Aux soldats.)
Venez tous, car le crime est flagrant.
HERNANI(regardant les soldats.)
À la bonne heure ! Seul, il me semblait trop grand. C'est bien. J'ai cru d'abord que c'était Charlemagne, Ce n'est que Charles-Quint !
DON CARLOS
Connétable d'Espagne ! Amiral de Castille, ici ! désarmez-les.(On entoure les conjurés et on les désarme. Don Ricardo, accourant et s'inclinant jusqu'à terre.)
Majesté !
DON CARLOS
Je te fais alcade du palais.
DON RICARDO(s'inclinant.)
Deux électeurs, au nom de la chambre dorée, Viennent complimenter la majesté sacrée !
DON CARLOS
Qu'ils entrent.(Bas à Ricardo.)
Doña Sol !
(Ricardo salue et sort. Entrent avec flambeaux et fanfares le roi de Bohême et le duc de Bavière, vêtus en drap d'or, couronne en tête. Nombreux cortège de seigneurs allemands portant la bannière de l'empire, l'aigle à deux têtes, avec l'écusson d'Espagne au milieu. Les soldats s'écartent, se rangent en haie, et font passage aux deux électeurs jusqu'à l'empereur, qu'ils saluent profondément, et qui leur rend leur salut en soulevant son chapeau.)