(LA COMTESSE, LA MARQUISE, LE CHEVALIER, DORANTE, ARLEQUIN.)
LA MARQUISE
Comtesse, votre jardiner m'apprend que vous êtes fâchée contre moi. Je viens vous demander pardon de la faute que j'ai faite sans le savoir, et c'est pour la réparer que je vous amène ce garçon-ci. Arlequin, quand je vous ai promis Marton, j'ignorais que madame pourrait s'en choquer, et je vous annonce que vous ne devez plus y compter.
ARLEQUIN
Eh bien ! je vous donne quittance. Mais on dit que Blaise est venu vous demander justice contre moi, madame. Je ne refuse pas de la faire bonne et prompte ; il n'y a qu'à appeler le notaire ; et s'il n'y est pas, qu'on prenne son clerc, je m'en contenterai.
LA COMTESSE(à Dorante.)
Renvoyez votre valet, monsieur ; et vous, madame, je vous invite à lui tenir parole. Je me charge même des frais de leur noce ; n'en parlons plus.
DORANTE(à Arlequin.)
Va-t'en.
ARLEQUIN(s'en allant.)
Il n'y a donc pas moyen d'esquiver Marton ! C'est vous, monsieur le chevalier, qui êtes cause de tout ce tapage-là ; vous avez mis tous nos amours sens dessus dessous. Si vous n'étiez pas ici, moi et mon maître, nous aurions bravement tous deux épousé notre comtesse et notre Lisette, et nous n'aurions pas votre marquise et sa Marton sur les bras. Hi ! hi ! hi !
LA MARQUISE ET LE CHEVALIER(riant.)
Eh ! eh ! eh !
LA COMTESSE(riant aussi.)
Eh ! eh ! Si ses extravagances vous amusent, dites-lui qu'il approche ; il parle de trop loin. La jolie scène !
LE CHEVALIER
C'est démencé d'amour.
DORANTE
Retire-toi, faquin.
LA MARQUISE
Ah çà ! comtesse, sommes-nous bonnes amies, à présent ?
LA COMTESSE
Ah ! les meilleures du monde, assurément ; vous êtes trop bonne.
DORANTE
Marquise, je vous apprends une chose ; c'est que la comtesse et le chevalier se marient peut-être ce soir.
LA MARQUISE
En vérité ?
LE CHEVALIER
Cé soir est loin encore.
DORANTE
L'impatience sied fort bien. Mais quand on est si près d'une si douce aventure, on a bien des choses à se dire. Laissons-leur ces moments-ci, et allons, de notre côté, songer à ce qui nous regarde.
LA MARQUISE
Allons, comtesse, que je vous embrasse avant de partir. Adieu, chevalier ; je vous fais mes compliments. À tantôt.
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