ACTE DEUXIÈME - Scène II
(Les précédents ; BUSSY D'AMBOISE.)
BUSSY D'AMBOISE
Eh ! oui, messieurs, lui-même, en personne… Aux amis, salut… Bonjour, Saint-Mégrin…
JOYEUSE
Ah ! ah ! vous êtes donc raccommodés… il voulait te tuer avec Quelus… il n'y a pas de sa faute, si le coup n'a pas réussi…
BUSSY D'AMBOISE
Oui… pour la dame de Sauve… mais depuis, nous avons mesuré nos épées ; et elles se sont trouvées de la même longueur…
SAINT-LUC
À propos de la dame de Sauve, on dit que, pour qu'elle soit plus sûre de ta fidélité, tu lui écris avec ton sang, comme Henri III écrivait de Pologne à la belle René de Châteauneuf… Sans doute elle était prévenue de ton arrivée, elle.
BUSSY D'AMBOISE
Non. Nous voyageons incognito… Mais je n'ai pas voulu passer si près de vous sans venir vous demander s'il n'y avait pas quelqu'un de vous qui eût besoin d'un second…
SAINT-MÉGRIN
Cela se pourra faire, si tu ne nous quittes pas trop tôt…
BUSSY D'AMBOISE
Tête Dieu !… le cas échéant, je suis homme à retarder mon départ… ainsi ne te gêne pas, il y a si longtemps que cela ne m'est arrivé ! c'est tout au plus si en province on trouve à avoir querelle une fois par semaine… Heureusement que j'avais là, sous la main, mon ami Saint-Phal ; nous nous sommes battus trois fois, parce qu'il soutenait avoir vu des X sur les boutons d'un habit, où je crois qu'il y avait des Y…
SAINT-MÉGRIN
Bah ! pas possible…
BUSSY D'AMBOISE
Sur Dieu !… Crillon était mon second…
JOYEUSE
Et qui avait raison ?
BUSSY D'AMBOISE
Nous n'en savons rien encore : la quatrième rencontre en décidera… Mais que vois-je donc là-bas ? les pages d'Entraguet !… Je croyais que depuis la mort de Quelus…
SAINT-LUC
Le duc de Guise a sollicité sa grâce.
BUSSY D'AMBOISE
Ah ! oui, sollicité… j'entends… Il est donc toujours insolent, notre beau cousin de Guise ?…
SAINT-MÉGRIN
Pas encore assez…
D'ÉPERNON
Vrai Dieu ! tu es difficile… je suis sûr qu'au fond du cœur, le roi n'est pas de ton avis ?
SAINT-MÉGRIN
Qu'il dise donc un mot.
D'ÉPERNON
Ah ! vois-tu… c'est qu'il est trop occupé dans ce moment… il apprend le latin.
SAINT-MÉGRIN
Tête Dieu !… qu'a-t-il besoin de latin pour parler à des Français ; qu'il dise seulement : à moi, ma brave noblesse ! et un millier d'épées qui coupent bien, sortiront des fourreaux, où elles se rouillent. N'a-t-il plus dans la poitrine le même cœur qui battait à Jarnac et à Moncontour, ou ses gants parfumés ont-ils amolli ses mains, au point qu'elles ne puissent plus serrer la garde d'une épée ?…
D'ÉPERNON
Silence ! Saint-Mégrin… le voilà…
UN PAGE (, entrant.)
Le roi…
BUSSY D'AMBOISE
Je vais me tenir un peu à l'écart… Je ne me montrerai que s'il est de bonne humeur…
UN SECOND PAGE
Le roi.
(Tout le monde se lève et se groupe.)
UN TROISIÈME PAGE
Le roi.