GINGINET, JULES, COURTEVOIL, puis LA BONNE
GINGINET
(fermant son parapluie et à JULES. )
Maintenant, monsieur, nous sommes seuls… vous allez m'expliquer. Hein! qu'est-ce?…(Regardant son lit.)
Qui s'est fourré dans mon lit?… (Courant à COURTEVOIL et le secouant sans le reconnaître.)
Monsieur !… monsieur !
COURTEVOIL
(se réveillant. )
Mais mille millions…
GINGINET
Encore lui !
COURTEVOIL
(se levant. )
Sacrebleu ! il faut que ça finisse !
GINGINET
Quoi ?
COURTEVOIL
J'ai mon affaire !
(tire un pistolet de la poche de son caleçon.)
Un pistolet !
COURTEVOIL
Écoutez-moi bien… Je vais dormir… et le premier qui me réveille, foi de Courtevoil ! je lui casse la margoulette.
Comment ?
COURTEVOIL
Allez, maintenant !
(se couche, son pistolet à la main.)
JULES
(bas à GINGINET. )
C'est votre faute aussi… vous le secouez!
GINGINET
Je le secoue… Pourquoi prend-il mon lit?
JULES
Pas si haut !
GINGINET
C'est juste ! (Très bas.)
Pourquoi prend-il mon lit ?
LA BONNE, entrant avec un paquet d'habits et des bottines, très haut.
V'là vos habits !
(la faisant taire. )
Chut !
LA BONNE
Quoi ?
JULES
Parle tout bas.
GINGINET
Ote tes sabots.
LA BONNE
(bas, montrant COURTEVOIL. )
Est-ce que l'autre est malade ?
JULES
Oui ; ôte tes sabots !
(Elle ôte ses sabots. GINGINET et JULES en prennent chacun un. La bonne dépose les habits sur une chaise.)
GINGINET
Sans bruit ! sans bruit !
LA BONNE
(bas. )
II faut vous dépêcher de vous habiller, l'omnibus va venir vous prendre dans un quart d'heure.
JULES
Très bien ; va-t'en ! marche sur tes pointes…
LA BONNE
Et mes sabots !
GINGINET
Plus tard… quand nous partirons… Elle ferait un tapage dans le corridor !
(La bonne sort sur la pointe des pieds.)
JULES
Maintenant, habillons-nous…
GINGINET
Sans bruit ! (Poussant un grand cri.)
Ah ! saprelotte !
JULES
(effrayé. )
Taisez-vous donc ! Êtes-vous bête de crier comme ça !
GINGINET
Si vous saviez ce qui m'arrive…
JULES
Quoi ? Dites-le tout bas !
GINGINET
Ma sacoche est restée sous le traversin… et il dort dessus.
JULES
Eh bien ?
GINGINET
II y a dedans la dot de Jenny… cent cinquante mille francs!…
JULES
(s'oubliant et poussant un cri. )
Saprelotte !
GINGINET
(se baissant vivement. )
Taisez-vous donc !
JULES
Ça m'a échappé…
GINGINET
Vous comprenez que je n'ai pas envie de perdre cette somme.
JULES
Comme tuteur… ce serait d'une mauvaise gestion… Eh bien! tâchez de rattraper votre affaire… moi, je vais faire un tour dans le couloir.
GINGINET
Vous m'abandonnez !
JULES
Dame! (COURTEVOIL ronfle.)
Attendez! J'ai un moyen… Quand un homme ronfle et qu'on ronfle avec lui… jamais il ne se réveille… Il s'agit de prendre la note.
GINGINET
Et ma sacoche…
JULES
(se mettant à ronfler à l'unisson avec COURTEVOIL. )
Allez ! Il n'y a pas de danger.
(Tous deux s'approchent du lit avec précaution.)
GINGINET
(fourrant sa main sous le traversin avec précaution. )
Vous êtes bien sûr ?
JULES
(à GINGINET. )
Ronflez aussi !
(Tous les trois se mettent à ronfler.)
GINGINET
(amène le portefeuille et crie. )
Je le tiens !…
JULES
Sapristi ! vous allez nous faire fusiller.
GINGINET
(très bas. )
Je le tiens !…
JULES
Habillons-nous et filons.
(essaye de mettre ses bottines.)
GINGINET
(s'habillant. )
Je vous prie de croire… que je n'ai pas envie de rester ici… JULES.
Mais ce n'est pas à moi, ces bottines-là !
GINGINET
On s'est trompé… Appelez la bonne.
JULES
(à demi-voix. )
La bonne !
GINGINET
Plus bas…
JULES
(tout bas. )
La bonne !… Mais elle ne viendra pas… Je vais aller la chercher.
A
GINGINET(avant de sortir.)
Ne partez pas sans moi…
GINGINET
Soyez tranquille ! (A part.)
S'il croit que je tiens à l'attacher à ma personne.
JULES
(de la porte. )
A quelle station descendez-vous ?
GINGINET
Je ne sais pas !
JULES
C'est justement là que j'ai affaire.
(sort à droite et ferme la porte très fort. GINGINET se baisse très effrayé.)
(Un jardin. A droite, la maison d'habitation. A gauche, un petit bâtiment servant d'orangerie. Un jeu de tonneau au fond. Chaises, bancs et tables de jardin.PIGET, POMADOUR, COURTINAu lever du...
(Un salon de campagne, ouvrant au fond sur un jardin. Un buffet. Un râtelier avec un fusil de chasse, une poire à poudre et un sac à plomb. Portes latérales....
Un salon de campagne, porte au fond, portes latérales dans les pans coupés de droite et de gauche. — Une fenêtre à droite. Sur le devant, à droite, un guéridon....
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