(Ariane, Nérine.)
NÉRINE
Le Roi, de ce refus eût eu lieu de se plaindre,
Madame, vous devez un moment vous contraindre ;
Et quoiqu'en l'écoutant vous ne puissiez douter
Que c'est son amour seul qu'il vous faut écouter,
Votre hymen dont enfin l'heureux moment s'avance,
Semble vous obliger à cette complaisance.
Il vous perd, et la plainte a de quoi soulager.
ARIANE
Je sais qu'avec le Roi j'ai tout à ménager,
J'aurois tout de l'aigrir. L'asile qu'il nous prête
Contre la violence assure ma retraite.
D'ailleurs, tant de respect accompagne ses voeux,
Que souvent j'ai regret qu'il ne puisse être heureux.
Mais quand d'un premier feu l'âme toute occupée
Ne trouve de douceur qu'aux traits qui l'ont frappée,
C'est un sujet d'ennui qui ne peut s'exprimer,
Qu'un Amant qu'on néglige, et qui parle d'aimer.
Pour m'en rendre la peine à souffrir plus aisée,
Tandis que le Roi vient, parle-moi de Thésée.
Peins-moi bien quel honneur je reçois de sa foi,
Peins-moi bien tout l'amour dont il brûle pour moi ;
Offres-en à mes yeux la plus sensible image.
NÉRINE
Je crois que de son cœur vous avez tout l'hommage ;
Mais au point que de lui je vois vos sens charmés,
C'est beaucoup s'il vous aime autant que vous l'aimez.
ARIANE
Et puis-je trop l'aimer, quand tout brillant de gloire
Mille fameux exploits l'offrent à ma mémoire ?
De cent Monstres par lui l'Univers dégagé
Se voit d'un mauvais sang heureusement purgé.
Combien ainsi qu'Hercule a-t-il pris de victimes ?
Combien vengé de morts, combien puni de crimes ?
Procuste et Cercyon, la terreur des Humains,
N'ont-ils pas succombé sous ses vaillantes mains ?
Ce n'est point le vanter que ce qu'on m'entend dire.
Tout le monde le sait, tout le monde l'admire ;
Mais c'est peu, je voudrois que tout ce que je vois
S'en entretînt sans cesse, en parlât comme moi.
J'aime Phèdre ; tu sais combien elle m'est chère.
Si quelque chose en elle a de quoi me déplaire,
C'est de voir son esprit de froideur combattu,
Négliger entre nous de louer sa vertu.
Quand je dis qu'il s'acquiert une gloire immortelle,
Elle applaudit, m'approuve, et qui feroit moins qu'elle ?
Mais enfin d'elle-même on ne l'entend jamais
De ce charmant Héros élever les hauts faits.
Il faut en leur faveur expliquer son silence.
NÉRINE
Je ne m'étonne point de cette indifférence.
N'ayant jamais aimé, son cœur ne conçoit pas…
ARIANE
Elle évite peut-être un cruel embarras.
L'Amour n'a bien souvent qu'une douceur trompeuse ;
Mais vivre indifférente, est-ce une vie heureuse ?
NÉRINE
Apprenez-le du Roi, qui de vous trop charmé
Ne souffriroit pas tant, s'il n'avoit point aimé.
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