ACTE III - Scène première


AMPHITRYON
Oui, sans doute le sort tout exprès me le cache, Et des tours que je fais à la fin je suis las. Il n'est point de destin plus cruel, que je sache : Je ne saurais trouver, portant partout mes pas, Celui qu'à chercher je m'attache, Et je trouve tous ceux que je ne cherche pas. Mille fâcheux cruels, qui ne pensent pas l'être, De nos faits avec moi, sans beaucoup me connaître, Viennent se réjouir, pour me faire enrager. Dans l'embarras cruel du souci qui me blesse, De leurs embrassements et de leur allégresse Sur mon inquiétude ils viennent tous charger. En vain à passer je m'apprête, Pour fuir leurs persécutions, Leur tuante amitié de tous côtés m'arrête ; Et tandis qu'à l'ardeur de leurs expressions Je réponds d'un geste de tête, Je leur donne tout bas cent malédictions. Ah ! qu'on est peu flatté de louange, d'honneur, Et de tout ce que donne une grande victoire, Lorsque dans l'âme on souffre une vive douleur ! Et que l'on donnerait volontiers cette gloire, Pour avoir le repos du cœur ! Ma jalousie, à tout propos, Me promène sur ma disgrâce ; Et plus mon esprit y repasse, Moins j'en puis débrouiller le funeste chaos. Le vol des diamants n'est pas ce qui m'étonne : On lève les cachets, qu'on ne l'aperçoit pas ; Mais le don qu'on veut qu'hier j'en vins faire en personne Est ce qui fait ici mon cruel embarras. La nature parfois produit des ressemblances Dont quelques imposteurs ont pris droit d'abuser ; Mais il est hors de sens que sous ces apparences Un homme pour époux se puisse supposer, Et dans tous ces rapports sont mille différences Dont se peut une femme aisément aviser. Des charmes de la Thessalie On vante de tout temps les merveilleux effets ; Mais les contes fameux qui partout en sont faits, Dans mon esprit toujours ont passé pour folie ; Et ce serait du sort une étrange rigueur, Qu'au sortir d'une ample victoire Je fusse contraint de les croire, Aux dépens de mon propre honneur. Je veux la retâter sur ce fâcheux mystère, Et voir si ce n'est point une vaine chimère Qui sur ses sens troublés ait su prendre crédit. Ah ! fasse le Ciel équitable Que ce penser soit véritable, Et que, pour mon bonheur, elle ait perdu l'esprit !

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