ACTE III - Scène 6
Valère (riant.)
À ce que je puis voir, Maître Jacques, on paie mal votre franchise.
Maître Jacques
Morbleu ! Monsieur le nouveau venu, qui faites l'homme d'importance, ce n'est pas votre affaire. Riez de vos coups de bâton quand on vous on donnera, et ne venez point rire des miens.
Valère
Ah ! Monsieur Maître Jacques, ne vous fâchez pas, je vous prie.
Maître Jacques (à part.)
II file doux. Je veux faire le brave, et, s'il est assez sot pour me craindre, le frotter quelque peu. (Haut.)
Savez-vous bien, Monsieur le rieur, que je ne ris pas, moi, et que si vous m'échauffez la tête, je vous ferai rire d'une autre sorte ?
(Maître Jacques pousse Valère jusqu'au bout du théâtre en le menaçant.)
Valère
Hé ! doucement.
Maître Jacques
Comment, doucement ? Il ne me plaît pas, moi.
Valère
De grâce !
Maître Jacques
Vous êtes un impertinent.
Valère
Monsieur Maître Jacques !
Maître Jacques
II n'y a point de monsieur Maître Jacques pour un double. Si je prends un bâton, je vous rosserai d'importance.
Valère
Comment ! un bâton ?
(Valère le fait reculer autant qu'il l'a fait.)
Maître Jacques
Hé ! je ne parle pas de cela.
Valère
Savez-vous bien, Monsieur le fat, que je suis homme à vous rosser vous-même ?
Maître Jacques
Je n'en doute pas.
Valère
Que vous n'êtes, pour tout potage, qu'un faquin de cuisinier ?
Maître Jacques
Je le sais bien.
Valère
Et que vous ne me connaissez pas encore ?
Maître Jacques
Pardonnez-moi.
Valère
Vous me rosserez, dites-vous ?
Maître Jacques
Je le disais en raillant.
Valère
Et moi, je ne prends point de goût à votre raillerie. (Donnant des coups de bâton à Maître Jacques.)
Apprenez que vous êtes un mauvais railleur.
Maître Jacques (seul.)
Peste soit la sincérité ! c'est un mauvais métier désormais j'y renonce, et je ne veux plus dire vrai. Passe encore pour mon maître, il a quelque droit de me battre ; mais, pour ce monsieur l'intendant, je m'en vengerai si je le puis.