(MADAME DORVILLE, CONSTANCE, LISETTE, PASQUIN)
PASQUIN (, seul.)
Nos gens s'approchent, ne bougeons. (Il chante.)
La, la, rela.
MADAME DORVILLE (, à Lisette.)
Avez-vous parlé à ce garçon de ce que je vous ai dit ?
LISETTE
Oui, Madame.
PASQUIN (, saluant Madame Dorville.)
Par ce garçon, n'est-ce pas moi que vous entendez, Madame ? Oui, je sais ce dont il est question, et j'en ai instruit mon maître ; mais ce n'est pas là votre dernier mot, Madame, vous changerez de sentiment ; je prends la liberté de vous le dire, nous ne sommes pas si mal dans votre esprit.
MADAME DORVILLE
Vous êtes bien hardi, mon ami ; allez, passez votre chemin.
PASQUIN (, doucement.)
Madame, je vous demande pardon ; mais je ne passe point, je reste, je ne vais pas plus loin.
MADAME DORVILLE
Qu'est-ce que c'est que cet impertinent-là ? Lisette, dites-lui qu'il se retire.
LISETTE (, en priant Pasquin.)
Eh ! va-t'en, mon pauvre Pasquin, je t'en prie. (À part.)
Voilà une démence bien étonnante ! (Et à sa maîtresse.)
Madame, c'est qu'il est un peu imbécile.
PASQUIN (, souriant froidement.)
Point du tout, c'est seulement que je sais dire la bonne aventure. Jamais Madame ne séparera sa fille et mon maître. Ils sont faits pour s'aimer ; c'est l'avis des astres et le vôtre.
MADAME DORVILLE
Va-t'en. (Et puis regardant Constance.)
Ils sont nés pour s'aimer ! Ma fille, vous aurait-il entendu dire quelque chose qui ait pu lui donner cette idée ? Je me persuade que non, vous êtes trop bien née pour cela.
CONSTANCE (, timidement et tristement.)
Assurément, ma mère.
MADAME DORVILLE
C'est que Damon vous aura dit, sans doute, quelques galanteries ?
CONSTANCE
Mais, oui.
LISETTE
C'est un jeune homme fort estimable.
MADAME DORVILLE
Peut-être même vous a-t-il parlé d'amour ?
CONSTANCE (, tendrement.)
Quelques mots approchants.
LISETTE
Je ne plains pas celle qui l'épousera.
MADAME DORVILLE (, à LISETTE)
Taisez-vous. (À Constance.)
Et vous en avez badiné ?
CONSTANCE
Comme il s'expliquait d'une façon très respectueuse, et de l'air de la meilleure foi ; que, d'ailleurs, j'étais le plus souvent avec vous, et que je ne prévoyais pas que vous me défendriez de le voir, je n'ai pas cru devoir me fâcher contre un si honnête homme.
MADAME DORVILLE (, d'un air mystérieux.)
Constance, il était temps que vous ne le vissiez plus.
PASQUIN (, de loin.)
Et moi, je dis que voici le temps qu'ils se verront bien autrement.
MADAME DORVILLE
Retirons-nous, puisqu'il n'y a pas moyen de se défaire de lui.
PASQUIN (, à part.)
Où est cet étourdi qui ne vient point avec sa lettre ?
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