ACTE II - Scène VIII
Jeanet
…
Fanchon
…
Madelaine
…
Nérine
Ah ! je n'en pis plus, je sis toute essoflée ! Ah ! finfaron, tu m'as bien fait courir, tu ne m'écaperas mie. Justice, justice ! je boute empeschement au mariage. Chés mon mery, Monsieur, et je veux faire pindre che bon pindar-là.
Monsieur de Pourceaugnac
Encore !
Oronte
Quel diable d'homme est-ceci ?
Lucette
Et que boulés-bous dire, ambe bostre empachomen, et bostro pendarié ? Quaquel homo es bostre marit ?
Nérine
Oui, Medeme, et je sis sa femme.
Lucette
Aquo es faus, aquos yeu que soun sa fenno ; et se deû estre pendut, aquo sera yeu que lou faray penda.
Nérine
Je n'entains mie che baragoin-là.
Lucette
Yeu bous disy que yeu soun sa fenno.
Nérine
Sa femme ?
Lucette
Oy.
Nérine
Je vous dis que chest my, encore in coup, qui le sis.
Lucette
Et yeus bous sousteni yeu, qu'aquos yeu.
Nérine
Il y a quetre ans qu'il m'a éposée.
Lucette
Et yeu set ans y a que m'a preso per fenno.
Nérine
J'ay des gairents de tout ce que je dy.
Lucette
Tout mon païs lo sap.
Nérine
No ville en est témoin.
Lucette
Tout Pezenas a bist notre mariatge.
Nérine
Tout Chin-Quentin a assisté à no noce.
Lucette
Nou y a res de tan beritable.
Nérine
Il gn'y a rien de plus chertain.
Lucette
Gausos-tu dire lou contrari, valisquos ?
Nérine
Est-che que tu me démaintiras, méchaint homme ?
Monsieur de Pourceaugnac
Il est aussi vrai l'un que l'autre.
Lucette
Quaign'impudensso ! Et coussy, miserable, nou te soubenes plus de la pauro Françon, et del paure Jeanet, que soun lous fruits de notre mariatge ?
Nérine
Bayez un peu l'insolence. Quoy ? tu ne te souviens mie de chette pauvre ainfain, no petite Madelaine, que tu m'as laichée pour gaige de ta foy ?
Monsieur de Pourceaugnac
Voilà deux impudentes carognes !
Lucette
Beny, Françon, beny, Jeanet, beny, toustou, beny, toustoune, beny fayre beyre à un payre dénaturat la duretat qu'el a per nautres.
Nérine
Venez, Madelaine, me n'ainfain, venez-ves-en ichy faire honte à vo père de l'impudainche qu'il a.
Jeanet, Fanchon, Madelaine
(ensemble)
Ah ! mon papa, mon papa, mon papa !
Monsieur de Pourceaugnac
Diantre soit des petits fils de putains !
Lucette
Coussy, trayte, tu nou sios pas dins la darnière confusiu, de ressaupre à tal tous enfants, et de ferma l'aureillo à la tendresso paternello ? Tu nou m'escaperas pas, infame ; yeu te boli seguy per tout, et te reproucha ton crime jusquos à tant que me sio beniado, et que t'ayo fayt penia : couqui, te boli fayré penia.
Nérine
Ne rougis-tu mie de dire ches mots-là, et d'estre insainsible aux cairesses de chette pauvre ainfain ? Tu ne te sauveras mie de mes pattes ; et en dépit de tes dains, je feray bien voir que je sis ta femme, et je te feray pindre.
Jeanet, Fanchon, Madelaine
(tous ensemble.)
Mon papa, mon papa, mon papa !
Monsieur de Pourceaugnac
Au secours ! au secours ! Où fuirai-je ? Je n'en puis plus.
Oronte
Allez, vous ferez bien de le faire punir, et il mérite d'être pendu.