ACTE II - Scène IV


Spectateurs, Hommes et Femmes, sortant du théâtre ; puis Gredane, Madame Gredane, Bathilde puis Bigouret

Premier spectateur (donnant le bras à sa femme.)
Dépêchons-nous, il va pleuvoir !…

La Dame
Mais il pleut.

Deuxième spectateur
Pas une voiture sur la place !… C'est incroyable !

Premier spectateur
Mets ton mouchoir sur ton chapeau… et partons.
(Ils disparaissent ; mouvement des spectateurs, les uns se sauvent, les autres entrent dans le café.)

Gredane (entrant par la gauche au fond ; il donne le bras à sa femme ; il est suivi de Bathilde, sa fille.)
Ne nous pressons pas !… Nous avons le temps.

Bathilde
Papa, il pleut !

Madame Gredane
Bien ! mon chapeau neuf !

Gredane
Ouvrons le parapluie !… (Il ouvre un grand parapluie sous lequel ils s'abritent tous les trois.)
Là, maintenant, tenons conseil… Retournons-nous à pied ou en voiture ?

Madame Gredane
À pied ? Est-ce que vous auriez l'intention de nous faire barboter comme des canards ?

Gredane
Ne te fâche pas… c'est une question que je pose… Seulement, après minuit, la course est de deux francs cinquante, et dame ! pour un dentiste qui ne gagne pas de mille et des cents… Décidément, vous voulez une voiture ?

Madame Gredane et Bathilde
Mais oui !…

Gredane (prenant le parapluie, et remontant.)
Très bien ! je vais chercher un fiacre ! Attendez-moi !

Madame Gredane
Mais si tu emportes le parapluie !

Gredane
C'est juste… Oh ! que je suis bête ! mon futur gendre, M. Bigouret, demeure ici… Entrez chez lui.

Bathilde
Mais il dort peut-être, ce monsieur.

Gredane
Je vais le réveiller. (Allant à la porte de la pharmacie et frappant.)
Hé ! monsieur Bigouret !… C'est moi !… ouvrez, c'est moi !

Bigouret (off, dans la coulisse.)
Ah ! c'est encore toi !… tu vas voir !…
(La porte s'ouvre et Bigouret applique à Gredane un énorme soufflet.)

Gredane
Aïe !…

Tous
Ah !

Bigouret
Mon beau-père !…

Gredane
Mon gendre !…

Madame Gredane et Bathilde
Un soufflet !…

Bigouret
Je suis désolé… ce n'était pas pour vous… je me suis trompé ! (Aimable.)
Mais entrez donc vous reposer un moment !

Gredane
Jamais !… Après une pareille brutalité !

Bigouret
Voyons, monsieur Gredane !

Gredane
Ne m'approchez pas !… À l'avenir, je vous défends de m'adresser la parole ! (Aux dames.)
Vous m'entendez… plus de commerce entre vous et monsieur. Je vais chercher un fiacre ! (À part, en sortant.)
Moi qui vous croyais un homme du monde.
(Il sort par la gauche au fond.)


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