LES MEMES, MAURICE.
MAURICE(entrant.)
Eh bien, qu'y a-t-il donc?…
TOUS5
Maurice!
DUPLAN
Enfin! le train est arrivé!… Cinq minutes de plus, je devenais fou!
MAURICE
Calmez-vous, mon père…
DUPLAN
Tu vas en finir, je pense, avec tes hésitations?…
MAURICE
Oui, mon père…
TOUS5
Ah!…
MAURICE(bas à BERTHE.)
Quoi que je dise, ne vous étonnez de rien… ayez confiance! (Haut.)
Vous avez raison, mon père… mes hésitations n'ont que trop duré… et je prie ces dames de me les pardonner… Mais mon excuse est dans la grâce et dans la beauté de ces deux demoiselles…
EDGARD(à part.)
C'est vrai! moi-même je ne suis pas encore fixé.
MAURICE
Il faut cependant se décider… (Il regarde un moment BERTHE et LUCIE puis s'approche de MADAME PERUGIN.)
Madame Pérugin, voulez-vous me faire l'honneur de m'accorder la main de mademoiselle votre fille?
M. et MADAME CARBONEL(londissant.)
Comment! Lucie?
BERTHE(bas à sa mère.)
Ayez donc confiance!
DUPLAN(à part.)
Voilà une affaire terminée!
(Il remonte.)
LUCIE(pleurant, et à sa mère.)
Ah! je n'ai pas de chance !
MAURICE
Plaît-il?…
MADAME PERUGIN(vivement.)
Rien! un peu d'émotion!…
PERUGIN(à MAURICE.)
Monsieur…
MAURICE
Monsieur, avant de vous engager définitivement, il est un fait dont je dois vous donner connaissance…
PERUGIN
Parlez, mon gendre…
MAURICE
J'ai un ami… un ami qui m'a sauvé la vie en Italie…
BERTHE
M. Jules…
MAURICE
Je m'étais juré, si jamais je devenais riche, de ne pas oublier le service qu'il m'avait rendu…
TOUS6
Très bien.
MAURICE(tirant un papier de sa poche.)
Je viens de faire un acte de donation entre vifs, par lequel je déclare lui donner dès à présent une somme de cinq cent mille francs.
TOUS6
Hein?…
PERUGIN
Combien dites-vous?…
MAURICE
Cinq cent mille francs!… Nous avons partagé en frères…
MADAME PERUGIN
C'est insensé!
DUPLAN
C'est trop!
EDGARD
C'est colossal!
MAURICE(à madame PERUGIN, très gracieusement.)
Je ne suis plus qu'une moitié de million, madame…
MADAME CARBONEL(à part.)
Attrape!… c'est bien fait!
MAURICE
Mais, comme vous me l'avez fort bien dit, c'est moins pour ma fortune…
MADAME PERUGIN(froidement.)
Certainement…
PERUGIN
Sans doute… sans doute… (A part.)
Il est stupide!
LUCIE(à son père et à sa mère.)
C'est drôle! c'est M. Jules qui est le plus riche maintenant.
PERUGIN(bas à sa femme.)
Mais elle a raison!… Cinq cent mille francs de la donation…
MADAME PERUGIN
Et deux cents qu'il a…
PERUGIN
Ça fait sept…
MADAME PERUGIN
Et deux cent cinquante mille que nous donnons.
PERUGIN
Ça fait neuf cent cinquante!
MADAME PERUGIN
Il a son million!
PERUGIN
Caroline, nous ne devons pas sacrifier notre fille!
MADAME PERUGIN
J'allais te le dire…
PERUGIN(à MAURICE, en prenant sa fille à son bras.)
Monsieur, je serai franc… ma fille a disposé de son cœur depuis longtemps…
MADAME PERUGIN
Elle vient de m'en faire l'aveu à l'instant…
PERUGIN
Et, au moment suprême… une voix nous crie que nous ne devons pas sacrifier notre enfant… Lucie épousera le noble jeune homme auquel vous devez la vie!
LUCIE et BERTHE
Oh! quel bonheur!
M. et MADAME CARBONEL
Ils le refusent !
LUCIE(bas à MAURICE.)
Merci, monsieur Maurice…
MAURICE(bas.)
J'avais consulté votre album! (Haut.)
Maintenant, mon cher monsieur Carbonel, je suis libre… et mon cœur est d'accord avec mes paroles pour vous demander la main de mademoiselle Berthe.
TOUS4
Comment !
EDGARD(à part.)
Eh bien, et moi?… il ne fait que tourner!
CARBONEL
Permettez, mon cher… c'est que la position n'est plus la même…
BERTHE
Oh! papa!
MADAME CARBONEL(bas à son mari.)
Bah! acceptons-le…
CARBONEL
Une donation de cinq cent mille francs… ça change la thèse.
MAURICE(bas à CARBONEL.)
Chut!… elle est révocable.
CARBONEL(étonné.)
Comment?
MAURICE
Demandez à papa… un vieux notaire!
DUPLAN(bas.)
Pour cause de survenance d'enfants… article 953 et suivants… (A MAURICE.)
Tu es un fier gueux!
CARBONEL(pouffant de rire.)
Ah! bah! ah! bah!
MADAME CARBONEL
Quoi donc?…
CARBONEL(bas.)
La donation est révocable pour cause de survenance d'enfants…
MADAME CARBONEL(pouffant de rire.)
Ah! ah! ah!
BERTHE
Quoi donc?…
MADAME CARBONEL(bas à sa fille.)
La donation est révocable pour cause de… (S'arrêtant.)
Rien.
CARBONEL(à DUPLAN en désignant les PERUGIN.)
Je voudrais voir leur figure le jour du baptême… (Avec inquiétude.)
Ah! mais, dites donc… (Désignant BERTHE et MAURICE.)
Si le ciel allait ne pas bénir leur union !
DUPLAN
Soyez tranquille… je réponds de mon fils!
(Un jardin. A droite, la maison d'habitation. A gauche, un petit bâtiment servant d'orangerie. Un jeu de tonneau au fond. Chaises, bancs et tables de jardin.PIGET, POMADOUR, COURTINAu lever du...
(Un salon de campagne, ouvrant au fond sur un jardin. Un buffet. Un râtelier avec un fusil de chasse, une poire à poudre et un sac à plomb. Portes latérales....
Un salon de campagne, porte au fond, portes latérales dans les pans coupés de droite et de gauche. — Une fenêtre à droite. Sur le devant, à droite, un guéridon....
(BLANCMINET; PUIS ANTOINE; PUIS BOURGILLON; PUIS LOISEAU Le théâtre représente un jardin. Grille d'entrée au fond ; à droite, l'étude ; à gauche, un pavillon servant à serrer des instruments...
(Le théâtre représente un salon chez Lépinois. À droite, guéridon. À gauche, cheminée et canapé.)Laure Madame Lépinois Thérèse(Au lever au rideau, madame Lépinois et Laure s'essuient les yeux. Madame Lépinois...