Carmosine
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ACTE TROISIÈME - Scène III

Alfred de Musset

ACTE TROISIÈME - Scène III


(MINUCCIO , MAÎTRE BERNARD .)

MAÎTRE BERNARD
Tu crois à tout cela, Minuccio ?

MINUCCIO
Oui ; je l'écoute, je l'observe, et je crois que tout va pour le mieux.

MAÎTRE BERNARD
Tu crois à cette espèce de gaieté ? Mais toi-même, es-tu bien sincère ? Pourquoi ne veux-tu pas me dire ce qu'elle t'a confié hier, seul à seul ?

MINUCCIO
Je vous ai déjà répondu que je n'avais rien à vous répondre. Elle m'avait chargé, comme vous le voyez, de lui ramener Perillo. À peine avait-il essayé son casque, l'oiseau chaperonné est revenu au nid.

MAÎTRE BERNARD
Tout cela est étrange, tout cela est obscur. Et ce refrain que tu vas lui chanter, afin d'entretenir sa tristesse !

MINUCCIO
Vous voyez bien qu'il ne sert qu'à la chasser. Pensez-vous que je cherche à nuire ?

MAÎTRE BERNARD
Non, certes, mais je ne puis me défendre… Écoute, il faut que je te dise tout, bien que tu ne veuilles me rien dire. Une chose ici me fait plus que douter, me fait frémir, entends-tu bien ? Cette nuit, poussé par l'inquiétude, je m'étais approché doucement de la chambre de Carmosine, pour écouter si elle dormait. À travers la fente de la porte, entre le gond et la muraille, je l'ai vue assise dans son lit, avec un flambeau tout près d'elle ; elle écrivait, et, de temps en temps, elle semblait réfléchir très profondément, puis elle reprenait sa plume avec une vivacité effrayante, comme si elle eût obéi à quelque impression soudaine. Mon trouble en la voyant, ou ma curiosité, sont devenus trop forts. Je suis entré : tout aussitôt sa lumière s'est éteinte, et j'ai entendu le bruit d'un papier qui se froissait en glissant sous son chevet.

MINUCCIO
C'est quelque adieu à ce pauvre Antoine, qui s'est fait soldat, à ce qu'il croit.

MAÎTRE BERNARD
Ma fille l'ignorait.

MINUCCIO
Oh ! que non. Est-ce qu'un amant s'en va en silence ? Il ne se noierait même pas sans le dire.

MAÎTRE BERNARD
Je n'en sais rien, mais je croirais presque… Voilà cet imbécile qui revient avec ma femme. — Rentrons ; je veux que tu saches tout.

MINUCCIO
C'est encore votre fille qui a rappelé celui-là. Vous voyez bien qu'elle ne pense qu'à rire.
(Ils rentrent dans la maison.)


ACTE TROISIÈME - Scène III

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