OCTAVE, CÉLIO, VENANT DU FOND À DROITE.
OCTAVE
Comment, Célio, tu abandonnes la partie ?
CÉLIO (tenant un livre à la main.)
Que veux-tu que je fasse ?
OCTAVE
Te défies-tu de moi ? Te voilà pâle comme la neige. D'où viens-tu ?
CÉLIO
De chez ma mère.
OCTAVE
Pourquoi cette tristesse ?
CÉLIO
Je ne sais. Pardonne-moi, pardonne-moi ! Fais ce que tu voudras ; va trouver Marianne. — Dis-lui que me tromper, c'est me donner la mort, et que ma vie est dans ses yeux.
OCTAVE
Et que diantre as-tu à faire de la mort ? À propos de quoi y penses-tu ?
CÉLIO
Mon ami, je l'ai devant les yeux.
OCTAVE
La mort ?
CÉLIO
Oui, l'amour et la mort.
OCTAVE
Qu'est-ce à dire ?
CÉLIO
L'amour et la mort, Octave, se tiennent la main : celui-là est la source du plus grand bonheur que l'homme puisse rencontrer ici-bas ; celle-ci met un terme à toutes les douleurs, à tous les maux.
OCTAVE
C'est un livre que tu as là ?
CÉLIO
Oui, et que tu n'as probablement pas lu.
OCTAVE
Très probablement. Quand on en lit un, il n'y a pas de raison pour ne pas lire tous les autres.
CÉLIO (lisant.)
"Lorsque le cœur éprouve sincèrement un profond sentiment d'amour, il éprouve aussi comme une fatigue et une langueur qui lui font désirer de mourir. Pourquoi ? Je ne sais pas."
OCTAVE
Ni moi non plus.
CÉLIO (lisant.)
"Peut-être est-ce l'effet d'un premier amour, peut-être que ce vaste désert où nous sommes effraye les regards de celui qui aime, peut-être que cette terre ne lui semble plus habitable, s'il n'y peut trouver ce bonheur nouveau, unique, infini que son cœur lui représente."
OCTAVE
Ah ! çà, à qui en as-tu ?
CÉLIO (lisant.)
"Le paysan, l'artisan grossier, qui ne sait rien, la jeune fille timide, qui frémit d'ordinaire à la seule pensée de la mort, s'enhardit, lorsqu'elle aime, jusqu'à porter son regard sur un tombeau." — Octave, la mort nous mène à Dieu, et mes genoux plient quand j'y pense. Bonsoir, mon cher ami.
OCTAVE
Où vas-tu ?
CÉLIO
J'ai affaire en ville ce soir.
OCTAVE
Tu as l'air d'aller te noyer. Cette mort dont tu parles, est-ce que tu en as peur, par hasard ?
CÉLIO
Ah ! que j'eusse pu me faire un nom dans les tournois et les batailles ! Qu'il m'eût été permis de porter les couleurs de Marianne et de les teindre de mon sang ! Qu'on m'eût donné un rival à combattre, une armée entière à défier ! Que le sacrifice de ma vie eût pu lui être utile ! Je sais agir, mais je ne sais pas parler. Ma langue ne sert point mon cœur, et je mourrai sans m'être fait comprendre, comme un muet dans une prison.
OCTAVE
Voyons, Célio, à quoi penses-tu ? Il y a d'autres Mariannes sous le ciel. Soupons ensemble et moquons-nous de cette Marianne-là.
CÉLIO
Adieu, adieu. Je ne puis m'arrêter plus longtemps, je te verrai demain, mon ami.
(Il sort par la gauche.)
Un caprice, comédie en un acte écrite par Alfred de Musset en 1837, explore les subtilités des sentiments et les jeux d’amour dans un cadre bourgeois. L’histoire met en scène...
On ne saurait penser à tout, comédie en un acte écrite par Alfred de Musset en 1849, explore les petites absurdités de la vie conjugale et les quiproquos liés aux...
On ne badine pas avec l’amour, drame en trois actes écrit par Alfred de Musset en 1834, raconte une histoire d'amour tragique où les jeux de séduction et de fierté...
Louison, comédie en un acte écrite par Alfred de Musset en 1849, met en scène une situation légère et pleine de malice autour des thèmes de l’amour, de la jalousie...
Lorenzaccio, drame romantique écrit par Alfred de Musset en 1834, raconte l’histoire de Lorenzo de Médicis, surnommé Lorenzaccio, un jeune homme partagé entre ses idéaux de liberté et le cynisme...