(LA COMTESSE DE BLOIS, SUZANNE D'ÉGLOU, PIERRE DE KERSAC, YVES DE BOISROSÉ, LUC DE KERLEVAN, NOBLES, BRETONS ET FRANÇAIS.)
(Ils entrent précipitamment par la porte de droite. La duchesse tient contre son cœur Suzanne d'Églou qui sanglote.)
LE COMTE (DE RHUNE)(, à la duchesse.)
Ma justice sera bientôt faite, madame.
Deux coupables sont là. L'un a déjà péri.
Oh ! si je ne vengeais que l'outrage au mari,
Je les aurais jetés tous deux par la fenêtre
Dans l'étang, sans rien dire, et sans faire connaître
Ce déshonneur devant tous ceux de ma maison.
Mais il s'agit ici de haute trahison,
Et c'est vous maintenant que la chose regarde.
Pendant que vous dormiez tranquille sous ma garde,
Elle avait…
LA DUCHESSE (, l'interrompant.)
Je le sais, comte, je sais aussi
De quelle ruse usa la femme que voici
Pour perdre cet enfant. Il a failli, sans doute,
Il a bien mérité la mort ; mais sur sa route,
S'il n'avait point trouvé cet amour malfaisant,
Cette embûche cachée en ce corps séduisant,
Il restait probe et pur. C'est pour elle le crime
Et pour lui le pardon ; car il fut sa victime.
Songez donc qu'une femme avec cette beauté
A le même pouvoir que la fatalité,
Qu'un homme devant elle est toujours un esclave
Qu'une caresse enchaîne et qu'un baiser déprave.
LE COMTE
Duchesse, vous avez le droit de pardonner ;
Moi, mari, j'ai gardé celui de condamner,
J'en use.
LA DUCHESSE
Faites-lui grâce, je vous en prie.
LE COMTE
Et comptez-vous pour rien ma tendresse meurtrie,
Le nom terni, l'espoir brisé, le bonheur mort ?
Il me doit tout cela. Qu'il me paie. Ai-je tort ?
LA DUCHESSE
Le plus coupable, c'est l'autre amant, son complice.
LE COMTE
Qu'on me le donne.
LA DUCHESSE
Et vous feriez le sacrifice
De celui-ci ?
LE COMTE
Pour l'autre, oh ! oui, mais il attend.
(Montrant d'un geste furieux la fenêtre qui est à gauche des deux lits.)
Boisrosé ! Kerlevan ! Qu'on le jette à l'étang.
Avec la pierre au col et les deux mains liées.
LA DUCHESSE (, montrant Suzanne d'Églou, à demi-voix.)
Vos vengeances seront par ses larmes pliées :
Et l'Anglais sera pris tout à l'heure… Attendons.
JACQUES DE VALDEROSE (, fièrement, avec la voix encore pleine de larmes par moments.)
Mais moi, je ne veux point ni pitiés ni pardons.
(A la duchesse, montrant le comte.)
Votre bonté me touche, et la sienne m'outrage.
Quand il faudra mourir, j'aurai plus de courage
(Montrant le corps de la comtesse, puis montrant le comte.)
Que devant son amour, ou devant son sommeil.
Tuez-moi, car j'aurai sous l'eau meilleur réveil
(A Kerlevan qui lui lie les mains.)
Qu'ici. Toi, je te dois un baiser de ma mie.
(Montrant le corps de la comtesse.)
Va le prendre sans peur… Elle est bien endormie.
LE COMTE (, à Boisrosé et Kervelan.)
Finissez vite.
SUZANNE D'ÉGLOU (, se précipitant aux pieds du comte.)
Oh ! grâce, ayez pitié, pitié :
Car moi, je l'aime ! Il est à moi, je l'ai gagné.
J'ai tué ma cousine et je l'aimais. Oh grâce !
J'ai sauvé votre honneur, celui de votre race.
Oh pitié ! j'ai sauvé la comtesse de Blois.
(A tous ceux qui l'entourent.)
Vos cœurs sont-ils de pierre, et vos faces de bois
Que vous ne pleurez point ? Sauvez-le. C'est justice.
Je vous ai bien sauvés, moi. J'ai fait sacrifice
De tout ce qu'une femme a gardé de meilleur ;
Des rougeurs de mon front, des pudeurs de mon cœur,
De tout. J'ai donné mon orgueil de jeune fille,
Et perdu votre estime et livré ma famille.
Qu'on me le laisse, ou bien que, liée à son corps,
On me jette avec lui pour que nous soyons morts
Ensemble. Voyez-vous comme je suis infâme ?
Pitié ! Donnez-le-moi, car il a pris mon âme !
UN SOLDAT (, ouvrant la porte de droite.)
Un prisonnier.
(Bertrand Du Guesclin entre, suivi d'un prisonnier les mains liées derrière le dos, entre deux gardes.)
DU GUESCLIN
Voici l'Anglais Gautier Romas.
LA DUCHESSE (, à Du Guesclin.)
Merci, je savais bien qu'il n'échapperait pas
A Bertrand Du Guesclin.
DU GUESCLIN
J'avais suivi sa trace ;
Je le savais caché près de la porte basse.
Aussitôt qu'a sonné l'heure du rendez-vous,
Je n'eus qu'à le saisir comme l'on prend des loups.
LA DUCHESSE (, au comte.)
Il est mon prisonnier. Nous changeons l'un pour l'autre.
Montrant Valderose, puis montrant Gautier Romas.
Celui-là m'appartient. Comte, voici le vôtre.
LE COMTE (, la face terrible, debout devant Gautier Romas.)
Ah ! nous avons tramé des complots assez laids
Venant d'un chevalier, mais dignes d'un Anglais.
Un combat ne vaut point la ruse lâche et sourde,
Et l'amour d'une femme est une arme moins lourde
Qu'une épée, et pourtant meilleure à vos succès.
(Indiquant la fenêtre d'un geste furieux.)
Vous irez à l'étang, messire, et sans procès.
(Boisrosé et Kerlevan s'emparent du prisonnier et le portent vers la fenêtre.)
LA DUCHESSE (, montrant au comte Valderose agenouillé devant elle et qui lui baise les mains.)
Pardon pour cet enfant, comte.
LE COMTE
Je lui pardonne.
(On entend le bruit du corps de Gautier Romas qui tombe dans l'eau. Le comte se retourne, puis, courant vers les lits, il saisit le corps de sa femme, l'emporte jusqu'à la fenêtre où l'on a jeté l'Anglais et la précipite à son tour.)
LE COMTE (, hurlant par la fenêtre au dehors.)
Et maintenant, prends-la, félon, je te la donne !
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