Moi
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ACTE III - Scène V

Eugène Labiche

ACTE III - Scène V


Armand Thérèse ; puis Georges

Armand (seul.)
Quoi, article 214 ?…

Thérèse
Ah ! je te guettais ! je t'ai vu rentrer… Eh bien, as-tu vu M. Georges ?

Armand
Non… il était sorti… mais j'ai causé avec madame de Verrières… Ah ! Thérèse, quel cœur ! quelle âme ! quel charme !…

Thérèse
Oui, mais Georges…

Armand
Il était sorti ! Hier déjà, après le bal, j'ai passé plus d'une heure avec elle… on m'a raconté sa vie… une vie de sacrifice et de dévouement !
Thérèse impatientée.
Mais Georges ?

Armand
Il va venir… dès qu'il sera rentré, elle le conduira elle-même ici… Elle est si bonne ! car il faut la connaître…

Thérèse
Alors, il m'aime toujours ?
Armand : Certainement… Son abord paraît froid, sévère même…

Thérèse
Mais pourquoi a-t-il renoncé à ma main ?

Armand
Qui ça ?

Thérèse
Georges !

Armand
Ah ! parce que… non !… je ne puis te le dire… mais c'est l'homme le plus loyal et le plus dévoué que je connaisse… C'est le frère de sa sœur !… esprit, sensibilité, bienveillance !…

Thérèse
Georges ?

Armand
Sa sœur ! Georges aussi !

Thérèse
Et il va venir ?

Armand
Je les attends… il fera de nouveau sa demande, il s'excusera près de notre oncle… qui se laissera attendrir… Je compte beaucoup sur madame de Verrières…

Thérèse
Oh ! mon oncle fera tout ce que je voudrai !… Il est excellent pour moi… il me regarde avec une douceur toute paternelle… Hier soir, en rentrant, j'avais du chagrin… il me baisait les mains…

Armand
Comment ! lui ?

Thérèse
Ca lui arrive souvent…

Armand
C'est singulier… et qu'est-ce qu'il te dit en te baisant les mains ?

Thérèse
Oh ! je n'ose pas le répéter… Il me dit que je suis bien gentille… et que nous ferons très bon ménage ensemble.

Armand (à part, repoussant un soupçon.)
Allons donc ! je suis absurde !

Thérèse
Par exemple, ce matin, il m'a fait de la peine… sans le vouloir… il soupçonne Georges…

Armand
De quoi ?

Thérèse
D'avoir un amour dans le cœur pour une autre personne…

Armand
C'est une calomnie !

Thérèse
Il prétend que les idées de l'homme ne se fixent véritablement que de cinquante à cinquante-quatre ans.

Armand (à part.)
Juste ! son âge !… Parbleu ! j'éclaircirai ça !…
(Georges paraît au fond.)

Thérèse (l'apercevant.)
Ah ! voilà M. Georges !

Georges
Mademoiselle… j'hésite à me présenter devant vous… Pardonnez-moi… je ne suis pas coupable… ce que j'ai fait, je devais le faire… mais je n'ai jamais cessé de vous aimer…

Thérèse
Ah ! je le savais, bien !…

Armand
Tu es seul ? Je croyais que madame de Verrières…

Georges
Elle est restée en bas, dans la voiture.

Armand
Mais pourquoi ?… nous avons besoin de son appui… Je vais la chercher.

Georges
Non… reste ! j'ai à te parler !

Thérèse
Je vais la faire prier de monter… (À Armand.)
Toi, préviens mon oncle… ; il est dans son cabinet…
(Elle sort par le fond.)


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