FAYENSAL, ARTHUR
FAYENSAL
M. le comte Arthur de Bethmont.
ARTHUR
Fayensal! (A part.)
Ici, ce fripon d'intendant!
FAYENSAL
Lui-même… Achille sous la tente d'Hector.
ARTHUR
Que voulez-vous ?
FAYENSAL
Monsieur, c'est demain que notre procès doit être appelé.
ARTHUR
Oui, c'est demain que vous serez condamné à me restituer…
FAYENSAL
Oh! oh! oh! comme vous y allez!… nous n'en sommes pas encore là, mon cher monsieur… Demain, nous ne plaidons encore qu'une question de forme.
ARTHUR
La forme ! toujours la forme!
FAYENSAL
Le fond viendra plus tard… en son lieu… quand j'aurai fait vider trois ou quatre fins de non-recevoir, cinq ou six petites nullités… sans compter quelques questions accessoires de résidence, de déchéance et de compétence… Alors, nous pourrons voir.
ARTHUR
C'est trop fort! Le testament de mon père n'est-il pas formel ? Vous le savez mieux qu'un autre, vous, qu'il a eu l'imprudence de nommer son exécuteur testamentaire : n'avez-vous pas à me restituer une fortune de deux cent mille écus ?
FAYENSAL
Certainement! je ne le nie pas! Deux cent mille écus, six sous et six deniers… Mais, mettez-vous à ma place ; (AIR)
Il ne saurait m'échapper, cette fois. (Grand Criminel)
. Vous connaissant pour un dissipateur, Souvenez-vous que M. votre père, Tant qu'il vécut, se fit un point d'honneur De vous laisser presque dans la misère. Il est mort, mais, auprès de vous, Il m'a placé, comme un autre lui-même; Aussi, de tous ses droits jaloux, J'accomplis un devoir bien doux, En continuant son système, Je continuerai son système!
ARTHUR(sévèrement.)
Monsieur!…
FAYENSAL
D'ailleurs, la loi est là… vous n'êtes pas seul héritier… il y a plusieurs legs à côté du vôtre… Savez-vous ce que la loi dit à ce sujet ?
ARTHUR
Elle doit dire de partager à chacun selon ses droits.
FAYENSAL
Oui… mais elle ajoute, cette bonne petite loi, que, pour que le partage ait lieu, il faut que tous les cohéritiers soient présents.
ARTHUR
Eh bien ?
FAYENSAL
Il en manque un… un filleul de M. votre père, couché sur son testament pour mille pistoles… et dont le domicile est inconnu.
ARTHUR
Mais cherchez-le, ce filleul, c'est votre état.
FAYENSAL
Parbleu!… je l'ai cherché aussi, mais je ne l'ai pas trouvé. (A part.)
C'est mon état aussi!
ARTHUR
Et vous croyez que le Parlement jugera…
FAYENSAL
Il jugera… qu'il faut l'attendre pendant cinq ans.
ARTHUR
Et pendant cinq ans…
FAYENSAL
J'aurai l'embarras de tous les biens de la succession… Je les administrerai en bon père de famille.
ARTHUR
Mais c'est intolérable!
FAYENSAL
Je le sais bien!… Aussi, je veux vous proposer une petite transaction.
ARTHUR
Expliquez-vous.
FAYENSAL
Selon toutes les prévisions, vous allez être condamné, faute de filleul, à cinq ans de mon administration forcée… Cinq ans!… vous concevez… Ces choses-là… ça n'a pas de prix… Eh bien!… abandonnez-moi… Qu'est-ce que vous pourriez bien m'abandonner ?… Vingt mille écus… c'est pour rien! et je me fais fort de retrouver le filleul demandé, je l'amène aux pieds du tribunal, et je verse entre vos mains le surplus de l'héritage… Hein ?
ARTHUR(sévèrement.)
Sortez, monsieur!
FAYENSAL
Ah bah! (A part.)
Je le croyais plus délabré. (Haut.)
Mais songez donc que j'ai le premier avocat du barreau… Lambert, le fameux Lambert… si célèbre pour avoir fait durer vingt-
cinq ans une petite contestation sur un mur mitoyen… qui a eu le temps de tomber… et, pour conseil, pour ami, l'illustre Dumarsay, notre rapporteur.
ARTHUR
Pour la dernière fois, monsieur, je ne compose pas avec la friponnerie… (Lui montrant la porte.)
C'est par cette porte que vous êtes entré…
FAYENSAL
Comme il vous plaira!… (A part.)
Décidément, je le croyais plus délabré.
ENSEMBLE1(AIR)
La colère m'exaspère Sortons, sortons vite, Car ma conduite L'irrite! En ces lieux, j'ai l'espoir De ne plus me voir! (Il sort au fond.)
ARTHUR
Sortez, sortez vite! Votre conduite M'irrite! En ces lieux, j'ai l'espoir De ne plus vous voir!
(Un jardin. A droite, la maison d'habitation. A gauche, un petit bâtiment servant d'orangerie. Un jeu de tonneau au fond. Chaises, bancs et tables de jardin.PIGET, POMADOUR, COURTINAu lever du...
(Un salon de campagne, ouvrant au fond sur un jardin. Un buffet. Un râtelier avec un fusil de chasse, une poire à poudre et un sac à plomb. Portes latérales....
Un salon de campagne, porte au fond, portes latérales dans les pans coupés de droite et de gauche. — Une fenêtre à droite. Sur le devant, à droite, un guéridon....
(BLANCMINET; PUIS ANTOINE; PUIS BOURGILLON; PUIS LOISEAU Le théâtre représente un jardin. Grille d'entrée au fond ; à droite, l'étude ; à gauche, un pavillon servant à serrer des instruments...
(Le théâtre représente un salon chez Lépinois. À droite, guéridon. À gauche, cheminée et canapé.)Laure Madame Lépinois Thérèse(Au lever au rideau, madame Lépinois et Laure s'essuient les yeux. Madame Lépinois...